Histoire de la Compagnie des Machines Bull
1959-1964
la description de
cette période est encore incomplète, les archives de la Compagnie n'ayant
guère été complètement dépouillées.
Fin 1959, le développement de la Cie des
Machines Bull, pour le Gamma 60, nécessite pour la fabrication et la mise au
point l'acquisition de nouveaux bâtiments rue Haxo (6.000 m²) et rue E.
Lefebvre (12.000 m²).
Les usines sont spécialisées de la manière suivante:
- Amsterdam = montage de tabulatrices / fabrication de trieuses (4.000 m² / 400
personnes)
- Lyon = perforatrices et vérificatrices / trieuses (5.620 m² / 418
personnes)
- St Quentin = pièces détachées (11.850 m² / 314 personnes)
- Vendôme = relais (3.075 m²)
- Mouy = câblage (3.800 m²)
- Les Andelys = montage de petits ensembles (1.765 m²/245 pers.)
- Saint Ouen = matériel classique 150 : montage, mise au point, contrôle
final. (8.000 m² / 404 personnes)
- Paris = matériel électronique : montage, mise au point, contrôle final.
(44.000 m² / 5.255 personnes).
Cependant, la décision de construire deux grandes usines nouvelles à Belfort
et Angers sera prise dans le cours de 1960. Belfort sera rapidement
opérationnel tandis que Angers sera inauguré au début 1963.
En janv. 1960 a eu lieu la livraison du premier Gamma 60 à l'E.D.F. à Paris. Elle sera suivie en novembre par la livraison de celui de la SNCF dont la principale application (le paye de 340 000 agents) sera mise en service le 15 avril 1961. La seconde en sera les règlements de la Caisse de Prévoyance pour les 1.700.000 agents ou ayant droits (novembre 1961)
On notera en 1960 la progression des cours de l'action
Compagnie des Machines Bull à 1830 frs de 1959 : 1350 frs, et 1958 :
901frs, en nouveaux francs. On notera aussi la progression des effectifs
de 1955 à 1961 :
1955 : 2.850,
1957 : 3.330,
1959 : 4.952,
1960 : 6.392,
1961 :7.783.
En 1961, ont lieu les première livraisons des matériels mécanographiques de la série 300 TI. La version à cartes de cette série représentait une rupture importante dans la gestion du parc de Bull. Jusqu'à ce moment, les matériels en retour de clientèle pouvaient être "reconstruits" et se réinsérer sans problème en clientèle. La Compagnie continua à reconstruire les tabulatrices 150 et à les accumuler dans les stocks et à les figurer à l'actif du bilan. Cet effet d'obsolescence volontairement planifiée allait représenter un des processus menant à la déroute financière. On peut y ajouter la foule de problèmes techniques inhérents à la série 300 et la concurrence que lui fera subir la 1401 de IBM. Georges Vieillard invoquera le retard de la gestation de la série 300, retard probablement induit par le caractère prioritaire donné au Gamma 60.
En juillet 1961 un nouveau Centre d'expédition de machines neuves est créé avec acquisition de nouveaux locaux à BOBIGNY (20.858 m²).
L'accord avec Remington-Rand -devenu Sperry-Rand-
ayant expiré en 1960, sans que Bull ait jugé bon d'en tirer parti en important
des matériels américains, Georges Vieillard doit prendre acte du succès de l'IBM
1401 au dépens de la Série 300 de CMB. Il n'arrive pas à s'accorder
avec Sperry Rand et explorant d'autres pistes. Les premiers contacts avec
General Electric datent de cette période. Ils n'aboutissent qu'à la vente de
perforateurs de cartes à GE. Finalement, CMB décide d'acquérir la licence de commercialisation
et de fabrication du RCA 301 et signe l'accord correspondant en octobre 1961.
Au début 1962, à la Régie des Télégraphes et Téléphones de Belgique (R.T.T.)
où est installé le Gamma 60 numéro 5, débute l'exploitation de la
facturation de toutes les communications téléphoniques des 600.000 abonnés.
Les consommations sont introduites dans le système par l'intermédiaire de
bandes perforées. C'est l'une des plus grosses exploitations quant à la
simultanéité des unités de traitement : 20 UT simultanées en moyenne, 24
heures sur 24. A noter que toutes les fonctionnalités du traducteur sont
employées du fait de l'entrée des données par bande perforée.
En 1962, débute la commercialisation du Multisélecteur connecté au Gamma AET,
et à la Série 300 TI. C'est sur ce matériel que commença la première
expérience du logiciel de tri sur bande magnétique.
En avril 1962, débutent les études d'une nouvelle machine dite "Petite Machine" (PM), destinée au marché des machines comptables. Huit exemplaires en furent construits et mises à l'essai. Ce programme sera revu en 1963 et renommé Gamma-5D.
En juillet 1962, Georges Vieillard quitte ses fonctions de directeur général pour prendre les fonctions de simple administrateur de la compagnie. Il est remplacé par Jean Perriquet, entré à la Compagnie en 1941, il a été successivement chef de fabrication, directeur technique d'exploitation, directeur adjoint à la Direction Générale puis directeur général adjoint.
au SICOB d'octobre 1962, la Compagnie des Machines
Bull présente :
- un équipement T.M.E. (dérivé de la série 150) - une Série 300 T.I. à
cartes (lecteur-perforateur / imprimante / calculateur électronique Gamma
322)
- un Gamma 30 (lecteur-perforateurs de cartes, de bandes / imprimante /
dérouleurs de rubans magnétiques / mémoire à disques / poste d'interrogation
à distance / trieuse-liseuse de formulaires), sous licence RCA
- une trieuse documentaire D3D
- le Tradan : système de télétransmission développé par LTT
- une trieuse-liseuse de documents CMC7
C'est aussi en 1962 que fut livré le Gamma 10, que l'on peut considérer comme le dernier système de mécanographie ou comme une machine de transition avec les ordinateurs de gestion par lots.
En fin 1962, et largement pour assurer le plan de charge de l'usine petits relais de Vendôme, fut lancé le Programmateur Numérique, ancêtre du GEADAC.
En juillet 1962, Harold Strickland , vice-président de General Electric, prend contact avec Joseph Callies pour envisager un accord avec Bull.
Début 1963, un accord entre Bull et SEA est signé pour assurer une commercialisation par Bull du petit ordinateur scientifique CAB500
Le 25 juillet 1963, Bull procède à un licenciement de 122 personnes dans les établissements de Gambetta et Saint-Ouen. La durée hebdomadaire de travail est ramenée de 45 heures à 40 heures (5x8).
Le 7 aout 1963, Joseph Callies rencontre Maurice Ponte (président
de la CSF) et Ambroise Roux (président de la CGE) en présence de Lucien
Malavard (conseiller de Gaston Palewski). La CGE attend le dépôt de bilan et
aucun accord n'est conclus.
En octobre 1963, La Banque de Paris et des Pays Bas (actionnaire et banquier de Bull) impose un nouveau directeur général adjoint Jean Bigard et obtient un siège supplémentaire au Conseil d'Administration pour Roger Schulz (en plus de Louis Bricard)
Le 23 décembre 1963, Joseph Callies informe Jean Reyre
(président de la Banque de Paris) que GE accepte une participation limitée à
20% dans Bull. Joseph Callies en prévient Giscard d'Estaing, ministre des
Finances) le 27 décembre, puis il écrit au président de la République
Georges Pompidou le 2 janvier 1964. Après avoir demandé un rapport à
Dominique Leca (l'Union), Pierre Delcourt (SNPA) et Maurice Lauré (Crédit
National), Valéry Giscard d'Estaing s'oppose à la prise de participation de
General Electric.
Le 5 février 1964, a lieu une réunion des cadres de CMB, ressentant une grande
inquiétude quant à leur avenir et à celui de la profession, décident de se
réunir. A 18h15, se tient une assemblée générale qui vote une motion, .
" Les cadres de la compagnie (associés à l'ensemble du personnel)
ressentent de vives inquiétudes quant à leur avenir et, plus généralement,
quant à l'avenir de leur profession ; "Ils sont conscients de l'importance
nationale de cet ensemble unique dans sa spécialité. "Ils craignent une
information insuffisante des responsables qui élaborent les décisions.
"Ils demandent que le caractère spécifique de leur profession et le cadre
dans lequel elle doit s'exercer soient pris en considération dans les
discussions en cours. " Ils demandent que la délégation qu'ils auront
mandatée soit entendue par les autorités compétentes". L'assemblée est
présidée par Pierre Davous (DE). Le bureau est composé de Jacques Chopin
(DE), Jean Louis Fortier (DE), Manuel Javary (DA), Philippe Levi (DCX), Bernard
Petit (DE), Postif (DE), Pierre Sicard (DP), Georges Vassallo (DF). Une
commission de 20 à 30 personnes, connaissant bien les problèmes de
l'entreprise, et représentant chacun des services est chargée : - de désigner
une première délégation de 3 à 5 membres qui assurera les contacts
nécessaires, - d'élaborer une motion plus étoffée que celle qui vient d'ètre
votée. La délégation est composée de titulaires (Philippe Levi -DCX-,
Jacques Fourot -DCF-, Bernard Capitant -DTE-, Pierre Davous et Jean Heusghem -DE-)
et de suppléants (Jean-Marie Lepagneur -DCX-, Maurice Travers -DCF-, Louis Despreaux
et Jean Carnasecca -DX, Maurice Bataille -DE-, Bernard Petit -DE-) . Une liste
de contacts extérieurs à établir est dressée. . Trois observateurs syndicaux
assisteront à toutes réunions plénières et partielles de la commission pour
assurer la liaison entre celle-ci et le personnel. (Observateurs : Cassin -CGT-,
suppléant Gorsd, Pichon -CFTC, suppléant Deneyrat, Paillard -CGC-, suppléant
Kloos.) . Les syndicats demandent à la commission de préciser sa position sur
les problèmes sociaux.
Cette assemblée témoigne d'un manque de confiance envers non seulement la
direction générale de la compagnie, mais aussi de l'inquiétude du personnel
devant les interventions politico-financières qui ont marqué ce qu'on appelée
l'affaire Bull de 1964.
C'est aussi en février 1964 que fut annoncée la démission des principaux cadres du réseau de ventes :MM Bonnet (DCF), Chargueraud (DCX) et Petersen (DCX) qui entrèrent chez General Electric. Ils reprendront leurs postes après la fusion en juillet.
Le 15 février 1964, Joseph Callies doit accepter un accord préparé par le gouvernement avec la CSF et la CGE qui place la Compagnie sous le protectorat de Roger Schulz.
Georges Vieillard continue cependant depuis le 21 janvier 1964 des négociations avec General Electric , obtient le 5 avril l'accord de Roger Schulz sur une solution GE. Le 7 avril, Giscard y consent et le 14 avril 1964, l'assemblée générale, en principe réunie pour conforter la "solution française" se voit proposer l'accord américain. Celui-ci inclut maintenant la participation majoritaire de GE et beaucoup de diplomatie a été nécessaire pour arracher le consentement des industriels français et celui du Président de la République.
Le 12 mai, l'assemblée générale des actionnaires de CMB approuve l'accord et Joseph Callies démissionne, remplacé par Roger Schultz.
L'achat de la Compagnie par General Electric sera
annoncée le 23 juillet 1964.
Bibliographie: